Manouchian
AuteurArtof Popof
Date : 2012 - (photos prises en 07/2012)
                Paris XX
C’est un hommage de 160 m² de haut comme sept étages qui a été commandé par la copropriété de l’immeuble à l’artiste graffeur d’origine russe Artof Popof. Une initiative soutenue par la mairie du XXème, le conseil de quartier et l’association Art Azoï.  
Le sujet est imposé ; il s’agit de rappeler à tous, la mémoire de ce groupe de 23 résistants communistes, arrêtés en novembre 1943 par la police française de Vichy, exécutés en février 1944 par les nazis. Lorsque l’artiste apprend qu’il est sélectionné pour réaliser cette fresque, il se sent tout de suite connecté à l’histoire du groupe Manouchian. Il ne connaît pas complètement l’histoire de ce groupe de résistants, mais lorsqu’il en sait un peu plus, il voit très vite une certaine résonance avec sa propre histoire : son père, journaliste, poète, écrivain, a subi 10 ans de goulag, pour des raisons culturelles dans son cas. Le rapport à Mélinée, illustré par la dernière lettre que Manouchian écrivit quelques heures avant son exécution, l’a beaucoup ému ; ses parents se sont mariés en prison, après un an et demi de lutte et une grève de la faim pour obtenir ce droit.  
Côté technique, la grandeur du mur à peindre impose à Popof d’adapter ses outils : la bombe aérosol n’est qu’un simple critérium face à une telle surface, c’est avec un rouleau de 40cm de large qu’il s’attaque à la réalisation. Cela lui demandera plus d’un mois accroché à une nacelle !! Il utilise également un assemblage de 5 pinceaux pour les arabesques. Un assemblable de sa composition qu’il a déjà utilisé pour ses toiles et qui est devenu en quelques sortes sa marque de fabrique, sa signature, son logo.  
La fresque a été inaugurée le 20 mars 2012. Elle est maintenant là pour nous rappeler chaque jour que le combat pour l’égalité et pour la liberté trouvera toujours des hommes et des femmes de courage tant que certains continueront à revendiquer une hiérarchie entre les Hommes.  
Je reproduis ici cette lettre si émouvante dans sa version originale, avec les fautes d’orthographe. Une preuve qu’on peut être immigré, poète et mourir en héros national, sans pour autant maîtriser toutes les arcanes de la grammaire et de l’orthographe de la langue française….  
« Ma chère Méline, ma petite orpheline bien aimée.  
Dans quelques heures je ne serai plus de ce monde. On va être fusillé cet après midi à 15 heures. Cela m’arrive comme un accident dans ma vie, j’y ne crois pas, mais pourtant, je sais que je ne te verrai plus jamais. Que puis-je t’écrire, tout est confus en moi et bien claire en même temps. Je m’étais engagé dans l’armée de la Liberation en soldat volontaire et je meurs à deux doigts de la victoire et de but. Bonheur ! À ceux qui vont nous survivre et goutter la douceur de la liberté et de la Paix de demain. J’en suis sûre que le peuple français et tous les combattants de la Liberté sauront honorer notre mémoir dignement. Au moment de mourir je proclame que je n’ai aucune haine contre le peuple allemand et contre qui que ce soit. Chacun aura ce qu’il meritera comme chatiment et comme recompense. Le peuple Allemand et tous les autres peuples vivront en paix et en fraternité après la guerre qui ne durera plus longtemps. Bonheur ! À tous ! — J’ai un regret profond de ne t’avoir pas rendu heureuse. Jaurais bien voulu avoir un enfant de toi comme tu le voulais toujours. Je te prie donc de te marier après la guerre sans faute et avoir un enfant pour mon honneur et pour accomplir ma dernière volonté. Marie-toi avec quelqu’un qui puisse te rendre heureuse. Tous mes biens et toutes mes affaires je lègue à toi et à ta sœur et pour mes neveux. Après la guerre tu pourra faire valoir ton droit de pension de guerre en temps que ma femme, car je meurs en soldat regulier de l’Armée française de la Liberation. Avec l’aide des amis qui voudront bien m’honorer, tu feras éditer mes poèmes et mes ecris qui valent d’être lus. Tu apportera mes souvenirs si possibles, à mes parents en Arménie. Je mourrai avec mes 23 camarades toute à l’heure avec courage et serénité d’un homme qui a la conscience bien tranquille, car personnellement, je n’ai fais mal à personne et si je l’ai fais, je l’ai fais sans haine. Aujourd’hui il y a du soleil. C’est en regardant au soleil et à la belle nature que jai tant aimé que je dirai Adieu ! À la vie et à vous tous ma bien chère femme et mes bien chers amis. Je pardonne à tous ceux qui m’ont fait du mal où qui ont voulu me faire du mal sauf à celui qui nous à trahis pour racheter sa peau et ceux qui nous ont vendu. Je t’embrasse bien bien fort ainsi que ta sœur et tous les amis qui me connaisse de loin ou de près, je vous serre tous sur mon cœur.  
Adieu.  
Ton ami Ton camarade Ton mari Manouchian Michel (djanigt).  
P.S. Jai quinze mille francs dans la valise de la Rue de Plaisance. Si tu peus les prendre rends mes dettes et donne le reste à Armène. M.M. ».